Fiche Google My Business : une dentiste assigne la firme et obtient réparation pour « finalité commerciale cachée »

Actualités des Avis clients

17 novembre 2022

En 2017, une dentiste inscrit son nom dans le célèbre moteur de recherche. À sa grande surprise, elle y découvre l’existence d’une fiche Google My Business liée à son activité professionnelle. Outre une note et des avis en lien avec son établissement, la praticienne constate également les mentions de données personnelles. Impossible pourtant de retirer les commentaires en question ou de désactiver la fonction « avis ». Google refusant de l’y aider, la doctoresse décide de l’assigner en justice. Retour sur une condamnation plutôt rare en la matière !

application mobile GMB

Google France responsable du traitement

Google LLC, Google Ireland Ltd et Google France ont toutes trois été assignées par la dentiste. Le tribunal a estimé que, pour apparaître dans l’annuaire, la praticienne a fait l’objet d’un démarchage commercial de la part de la filiale française, devenant de fait responsable du traitement des données collectées. Ces dernières nourrissent son activité publicitaire, alimentant à leur tour celle du groupe, et inversement. Les entreprises sont bien liées et sont donc toutes concernées par l’affaire.

La licéité du traitement

La question du consentement

Pour qu’un traitement soit licite, au moins une des conditions de l’article 6 du RGPD doit être remplie. Parmi elles se trouve le consentement de l’individu : « La personne concernée a consenti au traitement de ses données à caractère personnel pour une ou plusieurs finalités spécifiques ». Dans le cas présent, il s’avère que la praticienne n’a à aucun moment consenti à ce que ses données, recensées chez son FAI, soient transmises à des tiers. Par voie de conséquence, elle ne peut donc avoir approuvé le traitement lié à sa fiche Google My Business.

L’intérêt légitime comme base légale de Google

« Le traitement est nécessaire aux fins des intérêts légitimes poursuivis par le responsable du traitement ou par un tiers […] ». Selon l’article 6 du RGPD, d’autres conditions que le consentement sont également recevables pour acter la licéité d’un traitement. Parmi elles se trouve l’intérêt légitime. En l’occurrence dans cette affaire, le traitement de Google était fondé sur son intérêt légitime du droit à l’information.

Ce que dit le jugement :
« À ce titre, pour que le droit à l’information ne contrevienne pas aux droits de la personne qui en est l’objet, il faut à minima que la source d’information soit fiable, dans le sens où il doit être possible de vérifier que l’information qu’elle donne est le fruit de son expérience. Il faut également que la source d’information soit identifiable ».

Une finalité commerciale dissimulée

L’intérêt légitime de Google l’est-il vraiment ? Le tribunal s’interroge donc. L’intérêt légitime est en effet valable si les intérêts de chacun sont suffisamment mis en balance les uns par rapport aux autres. Les intérêts du responsable du traitement ne doivent pas prévaloir sur ceux des personnes concernées, et inversement.

La publication seule d’une fiche GMB peut effectivement revêtir un objectif informatif. Mais qu’en est-il si celle-ci est couplée aux commentaires et notations ? La justice a estimé que la firme encourage par ce biais à utiliser ses autres services. En l’occurrence, l’analyse par le juge de la mise en balance des intérêts démontre qu’il existe bien une finalité commerciale. Dès lors, l’intérêt légitime de Google ne lui permet pas de passer outre le consentement de la praticienne.

Ce que dit le jugement :
« In fine, si la diffusion de la seule fiche du professionnel poursuit en effet un caractère informatif, la diffusion combinée de la fiche et des avis constitue le moyen pour les sociétés Google d’inciter fortement les professionnels à recourir à ses services, qu’ils soient gratuits ou payants. C’est dès lors de parfaite mauvaise foi que les défenderesses prétendent que le traitement réalisé dans le cadre de la publication de la fiche entreprise est décorrélé des actes de prospection commerciale auxquels elles se livrent. »

Le droit à l’information et à la liberté d’expression

Pour faire prévaloir ces droits, l’information en question doit, outre ne porter préjudice à quiconque, pouvoir être vérifiée. Les avis publiés sur la plateforme n’étant pas soumis à des opérations de contrôle, nul ne peut donc attester de leur véracité. Pour le tribunal, il subsiste bien un déséquilibre entre la volonté d’informer et la nécessité d’apporter des garanties suffisantes aux utilisateurs.

Ce que dit le jugement :

  • « Il suffit en effet pour déposer un avis, de créer un compte Gmail puis un compte Google avec des informations dont la réalité n’est absolument pas vérifiable ni vérifiée d’ailleurs, pour avoir le droit de participer à la réputation d’un professionnel » ;
  • « Or, les avis laissés par les internautes ont nécessairement des conséquences pour la future clientèle d’un professionnel […]. Si le principe de l’avis même n’est pas contestable au nom du droit à l’information et de la liberté d’expression, il est aussi particulièrement connu que l’internaute anonyme derrière son écran a une fâcheuse tendance à oublier tout sens de la modération, voire tout sens commun ».

Le défaut de loyauté et de transparence

Dans son article 5, le RGPD énonce que les données à caractère personnel doivent être : « traitées de manière licite, loyale et transparente au regard de la personne concernée (licéité, loyauté, transparence) ». En somme, le traitement effectué ne doit pas lui être préjudiciable. Celle-ci doit savoir ce qui est fait avec ses données et, le cas échéant, à qui elles sont transférées. En manquant à ses obligations d’information envers la professionnelle, Google a donc enfreint des principes clés du RGPD.

Google condamnée pour manquements au RGPD

Le tribunal de Chambéry, où était jugée l’affaire, a donné raison à la plaintive. Les trois sociétés ont été condamnées à procéder au retrait de la fiche, ainsi qu’au versement de 40 000 €. La moitié de la somme vise à réparer le préjudice moral subi, l’autre à rembourser les frais de procédure engagés.

 

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Source du jugement : Tribunal judiciaire de Chambéry, ch. civile, jugement du 15 septembre 2022

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